La Bretagne est dotée d’un réseau hydrographique très dense, avec environ 30 000 km de ruisseaux, rivières et fleuves. Le sous-sol breton favorise en effet le ruissellement de l’eau en surface. C’est pourquoi il a longtemps été réputé comme peu perméable (jusqu’à l’apparition, au milieu des années 1970, des techniques de foration rapide à l’air comprimé (marteau fond de trou)) et donc pauvre en ressources en eau souterraine. Ainsi, dans la région, l’alimentation en eau potable est assurée à 25% seulement par les eaux souterraines , les 75% restants étant issus des eaux superficielles (cours d’eau et retenues), à l’inverse du reste du territoire national. Il faut noter que ce pourcentage varie selon les départements bretons, en fonction de la nature géologique des terrains et de leur productivité.
L’utilisation des eaux souterraines est pourtant intéressante à plusieurs titres :
- le sous-sol breton n’est pas imperméable et de l’eau souterraine peut être trouvée en quantité et qualité suffisante pour assurer les principaux usages (eau potable, agriculture, industrie),
- la disponibilité et l’accessibilité des eaux souterraines (proximité ressource/besoins/utilisateurs) limite l’acheminement,
- le pouvoir filtrant du sous-sol assure une bonne protection naturelle (faible vulnérabilité) et une relative bonne qualité (peu de matières en suspension, pas de problèmes bactériologiques) des eaux souterraines , ce qui limite les coûts de traitement par rapport aux eaux de surface (en général, le seul traitement appliqué aux eaux souterraines et une chloration, en l’absence de problèmes de fer ou de nitrates ),
- dans certains secteurs, la présence de phénomènes naturels de dénitrification des eaux dans la nappe permet d’obtenir une eau dépourvue de nitrates (voir l’article sur la Qu’est-ce que la dénitrification ?).
Ces avantages sont cependant à relativiser par les débits, souvent faibles, des forages. Ces débits sont variables selon la nature géologique des formations aquifères : socle altéré/fissuré, bassins d’âge tertiaire, …
Dans les terrains de socle , la productivité des aquifères est étroitement liée à la présence d’altérites et au degré de fracturation des niveaux sous-jacents (voir Aquifères bretons et Les altérites du socle).
Cohérence entre bassins versants topographiques et hydrogéologiques
En première approximation, on peut considérer qu’en Bretagne, dans les aquifères de socle , il y a cohérence entre le bassin versant topographique et souterrain (ce qui n’est pas forcément le cas dans les aquifères sédimentaires, où les crêtes piézométriques ne suivent pas toujours les crêtes topographiques). Néanmoins, seule une carte piézométrique peut permettre de le confirmer, notamment à l’échelle d’un bassin d’alimentation de captage souterrain. En effet, en raison du possible rôle de failles, le bassin d’alimentation d’un captage (puits/forage/source ) ne correspond pas forcément au bassin versant topographique.
Exemple :
Une étude menée sur le bassin versant des Echelles (Ille-et-Vilaine) par le BRGM a montré que le bassin hydrogéologique est parallèle et superposable au bassin topographique de la rivière des Echelles, avec des limites de bassin versant identiques (Carn, 2008). Pour le démontrer, des mesures de niveau de nappe (mesures piézométriques) ont été effectuées dans l’aquifère granitique sur le contour du bassin topographique, au niveau de la crête topographique ainsi que de part et d’autre de celle-ci (voir l’article Réseau piézométrique régional).
Recharge , inertie des nappes et relation avec les cours d’eau
La recharge en eau de chaque aquifère est assurée par une partie de l’eau de pluie qui tombe à la surface du sol qui le surplombe directement, le pourcentage de l’eau de pluie qui s’infiltre est très variable d’un secteur à l’autre, évoluant de 10 à 40 % (modélisations effectuées sur 70 rivières bretonnes dans le cadre du projet SILURES Bretagne - Système d’Information pour la Localisation et l’Utilisation des Ressources en Eau Souterraine, B. Mougin et al. 2008), en fonction de la pente, de l’occupation du sol, de la nature des terrains. On peut considérer qu’en Bretagne il y a cohérence entre le bassin versant topographique et souterrain.
L’eau de pluie qui s’infiltre, participe tout d’abord, à la recharge de la réserve utile en eau du sol (évaluée fréquemment à 100 mm). Lorsque ce stock est pourvu, l’eau peut alors s’écouler selon la verticale, à travers le milieu non saturé du sous-sol (partie du sous-sol située entre le sol et la surface de la nappe) selon une vitesse de 1 à 3 m/an, vers le milieu saturé en profondeur (la nappe souterraine ), participant ainsi à sa recharge . Les aquifères reconstituent leurs réserves principalement en automne et en hiver car l’évaporation et la consommation d’eau par la végétation sont plus faibles qu’en été. Ainsi, selon la période de l’année, la profondeur de la nappe varie entre des niveaux hauts l’hiver et bas l’été.
L’eau suit alors un trajet à dominante horizontale, à une vitesse de 0,05 à 0,5 m/jour vers l’exutoire le plus proche (source , rivière, captage , forage…). La vitesse de déplacement de l’eau dans la nappe varie en fonction de sa pente, de la perméabilité des terrains traversés, de la taille des fissures et du nombre d’obstacles rencontrés par le filet d’eau. Globalement, cette vitesse est relativement lente, et le temps nécessaire au renouvellement du volume d’eau contenu dans un aquifère donné, est généralement long, de l’ordre de 10 à 30 ans en moyenne. Toutefois, l’eau infiltrée dans le sous-sol tout près de l’exutoire peut s’y retrouver relativement vite. La contribution des eaux souterraines au débit des rivières varie au cours de l’année : à l’étiage, en l’absence de pluie, l’eau des rivières peut être exclusivement constituée d’eau souterraine.
En Bretagne, il existe un fort contraste climatique d’Ouest en Est et du littoral vers l’intérieur des terres : la quantité de pluie et donc la recharge des nappes est par conséquent très variable sur le territoire régional.